Luca Guadagnino filme comme on caresse : avec lenteur, sensualité et une fascination pour les détails que d’autres couperaients au montage. Depuis Call Me by Your Name, il s’est imposé comme l’un des rares cinéastes à avoir fait du cinéma queer un espace d’élégance et de désir assumé, loin des caricatures et du militantisme plaqué.
Chez lui, l’amour entre hommes n’est pas un sujet : c’est une évidence, filmée avec la lumière dorée d’un après-midi d’été italien.
Guadagnino, c’est aussi un goût presque fétichiste pour les textures : un fruit mordu, une chemise froissée, une piscine qui ondule. Il filme la matière comme d’autres filment l’action. Dans Bones and All, l’horreur cannibale devient romance à ciel ouvert ; dans Suspiria, la danse contemporaine se mue en rituel occulte. Peu importe le genre, il infuse partout un érotisme latent, une sensualité trouble qui rappelle Bertolucci ou Wong Kar-wai.
En tant qu’icône queer, Guadagnino s’inscrit dans une lignée qui va de Fassbinder à Pedro Almodóvar : des auteurs qui ne négocient pas leur regard. Mais là où Fassbinder optait pour le cynisme et Almodóvar pour le baroque, Guadagnino préfère le velours : des récits où le queer se vit au soleil, dans les éclats de rire, les silences complices et les gestes suspendus.
Son style est profondément européen : dialogues qui prennent leur temps, personnages qui s’écoutent respirer, décors qui existent autant que les protagonistes. Il transforme la dolce vita en terrain d’exploration queer, et ses films fonctionnent comme des cartes postales sensuelles qu’on aurait envie de garder pour soi.
Luca Guadagnino ne fait pas seulement du cinéma queer : il l’élève à un art du frisson discret, du désir qui se devine autant qu’il se montre. Un cinéma qui nous rappelle que parfois, la plus grande déclaration d’amour tient dans un simple : parle-moi encore.
