Si l’on vous dit : “Tate McRae”, vous répondez peut-être : “TikTok pop star”. Mais avant les refrains entêtants et les clips cumulant des millions de vues, la Canadienne maniait les chaussons plus que le micro. Formée au ballet classique, McRae a d’abord appris à raconter des histoires avec son corps, à filer les émotions dans le silence, avant de trouver sa voix… au sens littéral.
Regarder ses vidéos, c’est comme assister à un mariage improbable : celui de la rigueur du plié et de la désinvolture de la pop mainstream. Ses mouvements trahissent toujours la discipline académique – un port de bras impeccable, une conscience de l’espace quasi chorégraphique – mais elle les détourne pour mieux les casser, les syncoper, les syncer sur la basse. Comme si Degas rencontrait MTV.
La pop actuelle adore les artistes “360°” : chanter, danser, produire, pleurer en slow-motion devant un néon rose. McRae coche toutes les cases, mais en y ajoutant cette physicalité rare qui vient du conservatoire. Dans Greedy, You Broke Me First ou Run for the Hills, la caméra ne capture pas seulement une interprète : elle saisit une chorégraphe de ses propres émotions, transformant la mélancolie en arabesque, le sarcasme en battement.
En ce sens, McRae s’inscrit dans une tradition plus large : celle des artistes qui viennent de la danse pour redessiner la scène pop. De Paula Abdul à FKA twigs, chaque génération a ses figures hybrides. Mais là où twigs explore l’art performance, McRae revendique un fun assumé : l’adrénaline des virages de caméra, la précision de chaque drop chorégraphique, et ce naturel adolescent qui frôle parfois la provocation.
C’est peut-être ça, la clé de son succès : un corps qui parle autant que la voix. Dans une époque saturée de playback et de chorés en copier-coller, McRae rappelle que la danse est plus qu’un gimmick TikTok : c’est une langue maternelle. Et elle, manifestement, la parle couramment.
